Accouchement : acte de soins et appréciation du risque ayant entraîné le dommage

Civil - Responsabilité
21/06/2019
Si l’accouchement par voie basse constitue un processus naturel, les manœuvres obstétricales pratiquées par un professionnel de santé lors de cet accouchement caractérisent un acte de soins au sens de l’article L. 1142-1 du Code de la santé publique.
Dès lors, l’indemnisation par l’ONIAM d’un dommage imputable à ces manœuvres nécessite d’apprécier le caractère faible ou élevé du risque dont la réalisation a entraîné ledit dommage.
Au cours d’un accouchement, en raison d’une dystocie des épaules de l’enfant à naître, un gynécologue obstétricien a effectué des manœuvres d’urgence obstétricales. Le nouveau-né ayant présenté une paralysie du plexus brachial droit ; la mère, agissant tant en son nom personnel qu’en sa qualité de représentante légale de son fils mineur, a assigné l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l’ONIAM) en indemnisation, après qu’une expertise a mis en évidence l’absence de faute du praticien et l’inexistence d’un dysfonctionnement de l’établissement de santé.

L’ONIAM se pourvoit en cassation contre l’arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, qui fait droit à la demande de la mère, contestant l’imputabilité directe et certaine du dommage aux actes médicaux réalisés, et le caractère anormal du dommage reconnu au regard du risque pris.

Concernant l’imputabilité du dommage
Aux termes de l’article L. 1142-1 II du Code de la santé publique : « Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement (…) n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, (…) au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes (…) de soins ».
En constatant que « que les experts notent, d’une part, que l’enfant ne présentait pas, au cours de sa vie intra-utérine et au moment précis de sa naissance, d’anomalies qui auraient pu interférer sur la paralysie obstétricale et sur le déroulement de l’accouchement, d’autre part, que la dystocie des épaules est une complication à risque majeur pour l’enfant, telle la lésion du plexus brachial, et que, pour faire face à la dystocie, les manœuvres les plus fréquemment utilisées sont celles qu’a réalisées le praticien ; qu’il retient, ensuite, que ces manœuvres, au cours desquelles une traction est exercée sur les racines du plexus et sur la tête fœtale, ont engendré la paralysie du plexus brachial ; que la cour d’appel n’a pu qu’en déduire que les préjudices subis par l’enfant étaient directement imputables à un acte de soins », la Cour de cassation confirme la décision des juges du fond.
 
Concernant l’anormalité du dommage
Aux termes de l’article L. 1142-1 II précité, l’ONIAM doit réparer au titre de la solidarité nationale, les dommages « lorsqu'ils sont directement imputables à des actes (…) de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité ».
En l’espèce, la Cour d’appel, après avoir énoncé que le risque issu des manœuvres en cause - soit la paralysie du plexus brachial - est notablement moins grave que le décès possible de l’enfant, reconnait que « si l’élongation du plexus brachial est une complication fréquente de la dystocie des épaules, les séquelles permanentes de paralysie sont beaucoup plus rares, entre 1 % et 2,5 % de ces cas, de sorte que la survenance du dommage présentait une faible probabilité et donc que l’anormalité du dommage était caractérisée ».

Les critères d’imputabilité directe et d’anormalité du dommage étant remplis, la Cour de cassation rejette le pourvoi de l’ONIAM.
Source : Actualités du droit